La France : entre déclin et modèle social (I)

lundi 23 avril 2007
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Des statistiques et de l’Idéologie

Avertissement au lecteur : Dans cette période d’élections, cette série d’articles se veut une réponse à des présentations économiques qui ne vont que dans un seul sens. Il me semble nécessaire et citoyen de mettre à disposition des éléments de compréhension sur la nature idéologique des statistiques en économie.

On peut en effet avec des données identiques, dégager un certain type d’analyse qui va conforter une idéologie politique, notamment le libéralisme, mais on peut avec les mêmes données, dégager une interprétation radicalement différente, dès lors, que l’on se dégage du mouvement apparent.

Introduction : Croissance et développement.

Le S.D.F et le P.D.G : Il était une fois un S.D.F qui demanda à rencontrer le patron d’une entreprise de boites d’allumettes (petites boites). « Monsieur Le P.D.G, recrutez moi come Directeur de la Production et je double celle-ci en 2 mois. Si j’échoue, je ne demande aucun salaire, si je réussis, je demande xxxxxxxxxxxxxxxxx, 00 ââ€Å¡¬, et je pars en vacances ». Le P.D.G hésita quelques instants, puis, se disant qu’il ne risquait rien, donna son accord.

2 mois après, le P.D.G constata, à son grand étonnement que la production et la vente avaient effectivement doublé. Interloqué, il demanda à son nouveau Directeur de la Production de lui expliquer comment il faisait. Le S.D.F indiqua qu’il s’agissait d’un « secret industriel », demanda sa paye et s’en alla sur son ile (parachute doré des patrons d’E.A.D.S ou d’ALCATEL).

Le P.D.G de plus en plus curieux, décida d’aller dans la rue, pour voir à la sortie d’un marchand de tabac, se qui se passait. Justement, un client sortait, et voulant allumer sa cigarette, sortit sa boite d’allumettes, l’ouvrit et .... toutes les allumettes tombèrent par terre. Plutôt que de les ramasser, le client alla en racheter une autre.

Le « secret industriel » était percé et ...renversant. Les boites d’allumettes au montage étaient inversées, l’image au lieu d’être dessus se trouvait placée en dessous. A chaque ouverture de boite, les allumettes tombaient, obligeant chaque client à racheter une nouvelle boite, ce qui expliquait le doublement en 2 mois de la production et de la vente.

Caricature ou réalité : On pourrait croire que cette histoire est une caricature de la réalité, pourtant, les accidents de voiture, développent la croissance (réparation automobile) la pollution développe la croissance (réparation des dégâts) [1].
On voit donc comment derrière un critère économique (la croissance), celle-ci peut se retourner contre les hommes (développement). Tout le document vise à montrer au lecteur comment les statistiques médiatisées développent une idéologie de l’enfermement.

LA QUESTION DE LA DETTE

1] Le mouvement apparent :

A écouter les responsables politiques, les médias et beaucoup de candidats [2], le premier problème en France serait celui de la dette. Un rapport spécial y a été consacré et tous les chiffres ont été sortis. Avant d’oser aller plus loin, j’indique par avance que je n’aime pas non plus la dette, car celui qui est endetté, par principe est moins libre que celui qui n’est pas endetté. Mais cette précaution initiale prise, rentrons dans le vif du sujet. Il ressort, au vu du graphique que notre dette publique semble effectivement s’envoler, de manière régulière, depuis le début des années 80. La dette pèse environ 1.200 milliards d’euros, ce qui en fait le deuxième budget du Pays [3] (derrière l’Education nationale).

2] Une dette insoutenable ?

Certains ont vu dans le niveau de la dette de l’Etat, l’idée que celle-ci devenait insoutenable. Les mieux placés pour juger la dette d’un Etat sont les marchés financiers eux-mêmes. Or quel est le titre du Monde : « La dette française, un fardeau qui s’arrache sur les marchés ». Comment une dette publique pourrait-elle être insoutenable, si celle-ci « s’arrache sur les marchés » ? A ceux qui ne font pas confiance au monde, je leur conseille de bien lire. Dans un article paru dans les Echos du 26 Octobre 2006, on apprend que la C.A.D.E.S [4] qui a emprunté sur les marchés financiers mondiaux s’est vu répondre : « ... les investisseurs locaux (les Canadiens) n’auraient pas hésité à payer un peu plus cher pour obtenir des titre d’un organisme qui est noté triple A ». Le responsable poursuit : « Grâce à cet emprunt en dollars canadiens, nous avons pu atteindre des investisseurs auxquels nous n’aurions pas eu accès autrement, essentiellement des fonds de pensions [5] et des gestionnaires de fonds canadiens ». Si les marchés financiers notent triple A, c’est qu’ils savent que leur placement est adossée à un système performant. Si les « fonds de pension » investissent dans notre « dette sociale » [6], ceci signifie en définitive, que c’est notre modèle social (retraites par répartition) qui finance les retraites par capitalisation.

3] De la relativité :

A en croire ceux qui dénoncent notre dette publique, nous serions le pays le plus endetté au monde, au bord de la faillite d’Etat. Il faut là encore prendre du recul et relativiser comme le montre ce graphique :

Le graphique permet bien de relativiser [7] notre niveau d’endettement par rapport aux autres Pays. Observons que le Pays le plus endetté au monde et pour plus du double de la France est le Japon (164 % de son P.I.B), devant l’Italie et la Belgique et nous avons un niveau d’endettement comparable à l’Allemagne et aux Etats-Unis, si l’on ne retient que le déficit public [8].

4] La croisade de la dette :

En cette période d’élections, il faut comprendre pourquoi l’attention est attirée sur la question de la dette. La dette joue le rôle de l’attraction terrestre pour les fusées. Si l’on est endetté, on ne peut donc pas mener une politique, fondée sur le développement des hommes (salaires, formation, qualification, santé etc). Une autre politique est donc impossible car il faut d’abord régler la question de la dette, sans d’ailleurs se poser cette question de bon sens : D’où vient la dette ?

5] La dette, c’est la faute aux fonctionnaires ?

Dans la série mea-culpa, je voudrais aborder l’épisode sur la faute aux fonctionnaires. C’est facile à montrer (en apparence) et c’est populaire, donc ça peut rapporter plus. La dette c’est donc « la faute aux fonctionnaires ». Trop de postes publics, trop d’emplois, trop d’Administration.... Supprimez-moi tout ça, et la question de la dette est réglée. C’est exactement ce qui se passe à partir de l’annnée 2003. J’attire l’attention du lecteur, sur le fait qu’auparavent, le graphique montre une accélération des emplois publics à partir de l’année 2000. La question est donc : Mais que s’est-il passé au cours de l’année 2000 qui justifie une augmentation des emplois publics qu’il faut "détruire" après ?

6] Du passé ne faisons pas table rase :

Si l’on regarde avec attention l’évolution sur une plus grande période, on constate que la dette n’augmente pas de manière régulière, mais uniquement dans des périodes courtes de 3 à 4 ans, notamment après 1990 et après l’an 2000. La question devient donc alors : Que s’est-l passé au cours de ces années pour que les déficits et l’emploi public augmentent ? Hors à chaque fois, le système économique a été traversé par des krachs boursiers : en 1990, c’est l’explosion de la « bulle immobilière », et en 2000, c’est l’explosion de la « bulle internet ».

7] Sauver la bourse :

C’est là, où il faut penser global (articuler le fonctionnement de l’économie publique et de l’économie privée). Le krach boursier de l’été 2000 a détruit environ 2.000 milliards d’euros (en France) en 24 mois. Mais dans une économie mondialisée qui repose avant tout, sur l’activité des marchés financiers, il fallait rapidement trouver des moyens qui permettent au système financier de ne pas tomber dans une crise systémique de type 1929. Les Etats [9] sont donc venus au « secours des marchés » en injectant des liquidités financières (emprunts d’états
et politique de baisse des taux d’intérêt visant à inciter les ménages à emprunter)

et en soutenant l’activité (emplois publics, privatisation d’entreprises, grands travaux [10] etc). La création monétaire qui en a résulté, a réalimenté les marchés, favorisant le développement de « l’industrie financière mondiale ».

On est donc ici très loin du mouvement apparent qui impute la responsabilité de la dette aux fonctionnaires. Dans la réalité, les déficits publics ont été la manne salvatrice des marchés. C’est pour cacher cette réalité là, que les fonctionnaires sont accusés.

- .


[1Ex : Naufrage de l’Erika.

[2De « Ségolène la douce » à « Nicolas le dur » en passant par « Bayrou le juste milieu ».

[3En tout cas tel que le budget nous est présenté...

[4Organisme créé pour régler et gérer notre dette sociale (C.S.G / R.D.S).

[5Les fonds de pension gèrent les intérêts des retraites par capitalisation.

[6En étant prêt à la « payer plus chère ».

[7Je ne dis pas que ce n’est pas important, mais je relativise son poids

[8Dans la réalité, ce sont les Etats-Unis (déficit commercial et balance des paiements) qui sont le Pays le plus endetté.

[9Tous les Etats capitalistes ont connu le développement de leur dette (Allemagne et Etats-Unis compris)

[10Aux Etats-Unis, la politique de grands travaux s’est traduite de manière particulière, par l’intervention militaire en Irak (budget militaire).



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