Immigration : les expulsions et les contrôles coûtent de plus en plus cher

jeudi 9 octobre 2008
popularité : 4%

La Cimade, qui était jusque là la seule organisation autorisée à exercer son activité dans les centres de rétention et qui le faisait bien, a fait savoir qu’elle refusait le morcellement en lots éclatés attribués à des prestataires de service de la mission de défense des étrangers placés en rétention comme le prévoit un décret gouvernemental.
.
Réunie en Assemblée générale extraordinaire le samedi 4 octobre, elle a décidé de « rechercher, avec des associations et organisations non gouvernementales, les conditions permettant la mise en œuvre d’une mission nationale cohérente, assumée conjointement » et demandé au ministre de l’Immigration de modifier le dispositif prévu par le décret et l’appel d’offres publiés fin août.
.
Entre temps, sous le titre « Les droits des étrangers ne peuvent se réduire à un marché », une pétition a été lancée sur l’internet, qui a réuni plus de 11 000 signatures en 24 heures (http://placeauxdroits.net/petition2/?petition=5)

Pour en savoir plus sur le coût réel de la « politique du chiffre » menée avec zèle par le ministre Hortefeux en direction des étrangers, voici un article de Carine Fouteau, publié sur Mediapart.fr.

En matière de lutte contre l’immigration irrégulière, la « politique du chiffre » menée par le gouvernement n’a pas seulement des répercussions humaines souvent dramatiques. Elle a aussi un coût budgétaire élevé. Les détails publiés en annexe du projet de loi de finances 2009 dans les missions « immigration, asile et intégration » et « sécurité » sont éloquents.

On y apprend incidemment que Brice Hortefeux devrait dépasser haut la main l’objectif d’expulsion de sans-papiers fixé par François Fillon. « Le nombre de reconduites effectives depuis la métropole est passé de 10.067 en 2002 à 23.186 fin 2007, la tendance pour 2008 est de l’ordre de 28.000 à 30.000 éloignements. » On ne lui en demandait pas tant (26.000).

Conséquence de cette inflation : l’Etat est sommé de dégager des crédits supplémentaires pour le fonctionnement des centres de rétention administrative (CRA) et pour l’« éloignement » des étrangers en situation irrégulière, selon la terminologie administrative.

Pour 2009, 70,8 millions d’euros seront mis de côté (contre 67,2 millions cette année). Dans le détail, le séjour en rétention (en moyenne dix jours par « retenu ») sera facturé 28,8 millions d’euros. Cela recouvre, entre autres, la restauration (plateau-repas) et la blanchisserie (pas toujours au point : lire dans l’onglet Prolonger), soit, selon les calculs des experts budgétaires, 38,84 euros par jour et par personne.

La hausse du nombre de places en CRA devrait être moins rapide que prévu, en raison de la destruction, cet été, des deux CRA de Paris-Vincennes (280 places). Forcés ou volontaires, les retours à la frontière coûtent 42 millions d’euros, soit un montant moyen de 2.186 euros par expulsion, correspondant aux frais de billets d’avion, de train ou de bateau et à la location de deux « aéronefs de type Beechcraft » de 50 places en métropole et en Guyane.

Vu le rythme des reconduites, cela pourrait ne pas être suffisant. « Il est envisagé de louer un second appareil pour la métropole au second semestre 2008 », indique le document budgétaire. Ces sommes sont à mettre en regard des 4,5 millions d’euros attribués à la Cimade cette année pour effectuer sa mission d’aide juridique aux étrangers enfermés dans les CRA.
Les salaires des policiers en garde et en escorte

Ce montant ne tient pas compte du personnel policier et militaire mobilisé pour la garde en rétention et les escortes vers le pays d’origine (en moyenne trois policiers, donc trois billets d’avion et chambres d’hôtel afférentes pour une expulsion).

C’est dans la mission « sécurité » du projet de loi de finances 2009 qu’on trouve quelques éléments de réponse. Les crédits prévus pour la police des étrangers et sûreté des transports internationaux atteignent 610,8 millions d’euros, dont 576,7 millions pour la seule masse salariale (rémunération des fonctionnaires). Ils concernent 11.257 équivalents temps plein sur des fonctions de contrôle des flux migratoires, de sûreté des transports (ports, aéroports et trains internationaux) et de lutte contre l’immigration irrégulière.

Malgré des demandes répétées auprès des ministères concernés, nous ne sommes pas parvenus à savoir précisément combien de policiers et de gendarmes sont affectés à la garde et à l’escorte des sans-papiers.

Pour tenter d’évaluer le coût complet de cette politique, il faudrait aussi pouvoir ajouter les dépenses effectuées pour l’acquisition de laissez-passer consulaires, les dépenses pour le fonctionnement des locaux de rétention administrative (LRA), les dépenses de fonctionnement de la zone d’attente (ZAPI) de Roissy ainsi que les investissements pour la construction de nouveaux centres de rétention.

On apprend, enfin, dans ces documents budgétaires, la création de titres de séjour électroniques, en plus de la généralisation de la biométrie en matière de visas, afin de limiter les usurpations d’identité. Dans la même optique, les tarifs des passeports et des cartes d’identité seront réhaussés. L’établissement d’un passeport (biométrique) devrait désormais coûter 89 euros au lieu de 60 pour les adultes, 45 euros au lieu de 30 pour les 15-18 ans et 20 euros pour les plus jeunes qui ne payaient rien jusque-là.

Carine Fouteau
Mediapart.fr



Documents joints

Pétition à imprimer

Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur