Les arcanes de la justice internationale

dimanche 9 novembre 2008
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Des organisations de défense des droits de la personne de tous les pays de l’ancienne Yougoslavie se mobilisent pour défendre Florence Hartmann, journaliste et ancienne porte-parole de l’ex-procureure générale du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), poursuivie par les magistrats de La Haye pour outrage à la Cour. La première audience a eu lieu le 27 octobre.

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Attachée de presse à l’ambassade de France à Belgrade, Florence Hartmann avait quitté la carrière diplomatique pour devenir correspondante du journal Le Monde en Serbie, d’où elle fut expulsée par le pouvoir. Devenue porte-parole de la procureur générale du TPIY , elle ne conservera pas ce poste jusqu’à la fin du mandat de Carla Del Ponte : limogée en avril 2006 sans autres explication, elle sera « placardisée » jusqu’à la fin de son contrat.

Les organisations de défense des droits de l’homme qui la soutiennent [1]
dénoncent le fait qu’elle soit seule prise pour cible alors que les faits qu’elle révèle ont déjà fait l’objet de bon nombre de reportages dans la presse dont les auteurs ne sont pas inquiétés.

En 2007, Florence Hartmann publie chez Flammarion « Paix et Châtiments » un livre-témoignage sur le fonctionnement du TPIY, institution internationale venue opportunément apaiser la mauvaise conscience des opinions occidentales face aux guerres de Croatie et de Bosnie. Florence Hartmann y révèle une justice parasitée par d’incessantes interventions et compromissions politiques.

C’est après cette publication et un article publié par l’Institut bosniaque en janvier 2008, la Chambre de première instance du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie accuse Florence Hartmann d’outrage au tribunal pour avoir « divulgué des informations contenues dans certaines décisions confidentielles de la Cour d’appel, durant le procès de Slobodan Milošević ». Concrètement, il s’agit des minutes du Conseil de défense suprême de Serbie sous la présidence de Slobodan Milošević, qui décrivent précisément la coordination entre Belgrade et les forces serbes de Bosnie et de Croatie.

Après l’arrestation de Milosevic et son extradition vers le TPIY en 2001, ces minutes furent exigées par le parquet du tribunal. Au nom son intérêt national, la Serbie posa comme condition que l’utilisation de ces documents soit strictement limitée au procès Milosevic. Une condition acceptée en 2003 par les juges, contestée deux ans plus tard par les mêmes et finalement confirmée sur appel de la Serbie.

Florence Hartmann révèle et conteste la décision des juges d’appel de ne pas autoriser l’accès intégral à ces minutes. Une décision qui a eu pour résultat, en 2007, d’en priver les juges de la Cour internationale de justice (CIJ) alors qu’ils jugeaient la plainte pour génocide déposée par la Bosnie contre la Serbie, notamment pour le massacre de près de huit mille Musulmans bosniaques dans l’enclave de Srebrenica en 1995. N’en ayant pas eu connaissance, la CIJ conclut dans son arrêt que, s’il y a bien eu génocide en Bosnie, la Serbie n’en est pas directement responsable. Bonne affaire pour la Serbie, qui échappe ainsi au paiement de réparations à la Bosnie.

Pour Florence Hartmann, la première audience a eu lieu le 27 octobre. Elle a refusé de plaider et entend le faire lors de sa prochaine comparution, programmée au cours des 30 prochains jours. Elle risque 7 ans de prison.


[1La liste des ONG signataires de cet appel :
Action for Human Rights, Podgorica
Advocacy Training Resource Center, Prishtinë/Priština
Aleskandar Zekovic, independent researcher of human rights abuses in Montenegro
Anima – Center for Women and Peace Education, Kotor
Association for Peace and Reconciliation, Gjakove/Ðakovica
Association of Lawyers, Montenegro
Association of Women to Women, Sarajevo
B.a.B.e. – Women’s Human Rights Group, Croatia
Bureau for Human Rights, Tuzla
Center for Peace, Non-violence and Human Rights, Osijek
Censor – Association for the promotion of free media
Civic Action Pancevo, Pancevo
Civic Committee for Human Rights, Zagreb
Documenta, Zagreb
Eye of vision, Peje/Pec
Helsinki Committee for Human Rights in BiH, Sarajevo
Helsinki Committee for Human Rights in Republika Srpska, Bijeljina
Helsinki Committee for Human Rights in Serbia, Belgrade
Helsinki Assembly of Citizens, Banja Luka
Humanitarian Law Center, Belgrade
Impunity Watch, Belgrade
INTEGRA, Prishtinë/Priština
International Forum-Montenegro
KODI – Association of lawyers for women’s human rights, Peje/Pec
Kosova Rehabilitation Center for Torture Victims, Prishtinë/Priština
League of women voters in Montenegro
Leskovac Committee for human Rights, Leskovac
Montenegrin Women’s lobby
Partners Kosova, Prishtinë/Priština
Sandzak Committee for the Protection of Human Rights and Freedoms, Novi Pazar
Women’s Safe House – Podgorica
Women in Black, Belgrade
Youth Initiative for Human Rights, Belgrade
Youth Initiative for Human Rights, Podgorica
Youth Initiative for Human Rights, Prishtinë/Priština
Youth Initiative for Human Rights, Sarajevo
YUKOM - Lawyers Committee for Human Rights, Belgrade



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