Emeutes urbaines à Sydney ,Australie

samedi 31 décembre 2005
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Source : revue de presse « Marianne » du 24/12/2005
Linsay

L’Australie vient de vivre des émeutes raciales d’une rare intensité. Et dire , que face au soulèvement de nos banlieues, les médias locaux fustigeaient encore, il y a quelques semaines, la faillite du modèle d’intégration à la française...

Avec sa carrure de gorille, Glen Steele n’est pas le genre de gaillard que l’on contredit. Surtout quand cet ancien joueur de rugby énumère les causes des pires émeutes raciales qu’ait jamais connuees l’Australie. Des scènes de « ratonnades anti-bougnoules », que le syndicat d’initiative local aura bien du mal à édulcorer.

Car les plages de Cronulla et de Bondi, situées à l’orée des beaux quartiers de Sydney, sont mondialement connues
par les surfeurs. Steele n’en démord pas : ce sont ces « maudits lebs »- l’injure qui désigne les 300 000 musulmans installés en Australie- qui ont transformé en bourg du Mississipi, au pire temps de l’« apartheid », ce petit paradis balnéaire. « Ces salopards, tranche-t-il, arrivent ici en bandes et interdisent à leur femme de se déshabiller. Du coup, ils passent leur temps à débiter des insanités à nos filles à chaque fois qu’elles se mettent en maillot de bain ! Je n’ai pas envie que ma fille de 4 ans et mon garçon, qui en a 11, endurent plus longtemps leurs obscénités. »

« C’est le résultat d’un ras-le-bol qui ne date pas d’hier », renchérit Danny Hanley, autre résident du quartier chic, dont les deux filles ont été tuées, en octobre 2004, dans l’attentat islamiste de Bali. Bruyants, arrogants et affamés de sexe, les Pakistanais ou Libanais roués de coups par des surfeurs du cru n’auraient eu ainsi que ce qu’ils méritaient. L’agression de deux maîtres nageurs blancs par une bande de jeunes aurait été le facteur déclenchant, monté en épingle par les prêcheurs de haine des radios locales. Sympathisant d’Australia First- l’équivalent australien du Front national-, le fulminant Alan Jones s’est chargé de ravitailler la meute des 5 000 manifestants en slogans homicides, dignes de la sinistre radio des Milles Collines de Kigali au Rwanda : « Que tous les vrais Australiens descendent dans la rue pour fêter la journée anticrouille », glapissait cet adepte d’un pays strictement anglo-saxon.

En plus de la bière à volonté, les militants du parti anti-immigration One Nation distribuaient à la horde enragée drapeaux et tee-shirts ornés de slogans vengeurs. Claquemuré dans son véhicule, un couple de Bengladais faisait les frais de cette fureur « justicière ». Un instant, la rumeur courut même que de jeunes Arabes s’étaient introduits dans la foule avec des ceintures d’explosifs ! Très vite, les commerçants d’apparence « bronzée », baissaient leur rideau de fer. Loin de se limiter au « paradis des surfeurs », les mêmes scènes se répétaient autour de Sydney, dans un rayon de 100 km.

Pris de court par cet embrasement, le gouvernement du New South Wales interdisait l’accès des plages, soudainement transformées en champs clos de la haine raciale...
Difficilement, 2500 policiers ont repris le contrôle des quartiers « sensibles », contaminés par cette montée aux extêmes des sites balnéaires. « Je refuse l’idée que l’Australie soit une société raciste », proteste, sans conviction, le Premier Ministre, John Howard. « Quand des meutes de jeunes Blancs prétendent trucider tous les mals blanchis et que l’on ose prétendre que ce n’est pas du racisme, alors je ne sais plus ce que les mots veulent dire », lui a rétorqué l’universitaire Amanda Wise. Car, comme la plupart de leurs collègues anglo-saxons, les journalistes autraliens n’étaient pas les derniers à conclure, face au soulèvement des banlieues françaises, qu’il marquait la faillite cinglante de notre modèle d’intégration raciale. Que n’avait-on tiré les leçons du multiculturalisme hédoniste pratiqué par Camberra...

APPEL AU MEURTRE SUR LES ONDES.

En fait, dans un pays dont les 25% des citoyens sont nés à l’étranger (on dénombre notamment 12% d’Asiatiques, 5,15% de Moyen-Orientaux, en plus de microcommunautés arméniennes, maltaises et est-européennes), hommes politiques et presse populaire fidélisent volontiers leur clientèle en touillant les préjugés raciaux. C’est spécialement vrai depuis les attentats de Londres, qui ont enraciné l’idée d’une « cinquième colonne musulmane ». « Ces gens-là devront adopter nos valeurs ou ils n’auront qu’à déguerpir », avertissait récemment le ministre de l’Education, Brendan Nelson. Lors de la campagne électorale, le Premier ministre, grand ami de George Bush, osa même affirmer que des réfugiés afghans, interceptés dans les eaux territoriales australiennes, avaient jeté leurs enfants par dessus bord. Ce « libéral » à géométrie variable a depuis admis que, dans l’intérêt de sa réélection, il s’était laissé quelque peu entraîner par son imagination.

Légitimés par ces insinuations fétides, les actes de vandalisme se sont multipliés ces derniers temps dans les mosquées de Melbourne et de Sydney. Et l’on ne compte plus les jeunes femmes arabes qui se font arracher leur voile dans la rue. Libre de vomir son poison sur les ondes, le vitupérant Alan Jones suggérait, voici peu, de « buter à vue un Libanais, car tous les autres ficheraient alors le camp dans l’heure ». Cet ahurissant appel au meurtre lui avait valu quelques appels indignés d’auditeurs musulmans.
« Ne nous emballons pas, leur a rétorqué Jones, car, jusqu’à preuve du contraire, ce ne sont pas des gamins blancs qui violent les passantes ».

Présidente de One Nation et chanteuse, à ses heures, de country music, Pauline Hanson excelle à répandre l’idée que la démocratie ausralienne a subi une corruption irréparable depuis qu’elle s’est ouverte, au dédut des années 50, à l’immigration de couleur. Fort de 8% des suffrages au plan national, son parti raciste prône le renvoi de la totalité des immigrés chez eux, la légalisation du port d’armes à feu et la suspension de toute aide fédérale à la population aborigène, annihilée à 80% lors de la colonisation de l’île. Dans certaines circonscriptions de l’Etat du Queensland, sa chasse aux « mal blanchis », rallie jusqu’à 25% d’un électorat anciennement travailliste et qui s’enorgueillit de compter dans son lignage au moins un forçat, déporté au XIXe siècle par la reine Victoria, le seul brevet d’appartenance à l’aristocratie du cru.

Est-ce à dire que le pire est certain et que le dernier mot restera aux émules locaux du Ku Klux Klan, avides d’expéditions punitives ? Les Commancherros et les Bra Boys, deux gangs locaux de motards, cousins des Hell’s Angels californiens, dénoncent la discrimination raciale et appellent à une trêve de Noel. Ils font valoir qu’en dépit de leur réputation sulfureuse ils comptent dans leurs rangs des adhérents de toutes couleurs.

Une leçon que les surfeurs de Bondi Beach seraient bien avisés de méditer



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mercredi 13 février 2008 à 12h27

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