LE PLUS VIEUX PARTI DU LIBAN

mercredi 3 décembre 2008
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Le Parti Communiste Libanais fêtera le 5 décembre son quatre-vingt-quatrième anniversaire. A Marseille, il invite à la Maison du Peuple (11 Bd de la Jamaïque 13015) à partir de 19 heures. Voici, grâce à Jean El-Cheikh, un bref rappel de ce sont ont été ces quatre-vingt-quatres ans et comment les communistes libanais envisagent l’avenir.

Le Parti Communiste Libanais est le plus ancien des partis politiques créés dans ce jeune Etat [1] qu’est la République du Liban sur une terre à l’histoire multimillénaire.

Le Parti Communiste Libanais (PCL) a été créé en 1924 sous le nom de « Parti du Peuple » par un groupe d’ouvriers et d’intellectuels de Hadath, un faubourg du sud de Beyrouth. C’est seulement après avoir rejoint le Komintern, en 1927, qu’il changea de nom pour devenir le parti des communistes libanais et syriens jusqu’en 1964, date à laquelle il fut divisé en Parti Communiste Libanais et Parti Communiste Syrien. Avant, il avait participé à la Grande Révolution Syrienne (1925-1927) contre le pouvoir français. Ses dirigeants furent arrêtés, son journal interdit et le parti dut entrer dans la clandestinité jusqu’en avril 1930, date de son deuxième congrès.

Le PCL a activement participé à la bataille de l’indépendance en 1943 et, dès 1945, les communistes créent des dizaines de syndicats. Dès 1947, après la publication de la doctrine Truman en 1947, [2] le PCL entre en lutte contre l’impérialisme américain dans la région. Il soutient la lutte du peuple palestinien et dénonce l’occupation sioniste.

Pour répondre aux agressions continues de l’armée israélienne contre le Liban, le PCL crée en 1969 la "Garde populaire". En 1978, elle devient le "Mouvement de résistance" à l’invasion israélienne, puis, en 1982, le "Front de résistance nationale libanaise". Le PCL a pris part à la guerre civile du côté de la coalition de gauche/musulmans/Palestiniens contre la coalition de droite/chrétiens (et plus tard Israéliens). Des centaines de militants communistes ont été tués ou enfermés dans des camps par l’armée israélienne et ses alliés de l’Armée du Liban Sud (ALS) [3]

Seuls face au communautarisme et au système confessionnel

La question de l’identité et de l’appartenance nationale du Liban est apparue fortement après l’assassinat de l’ancien premier ministre Rafic Hariri. Au Liban, chaque parti politique se prononce pour une identité différente du pays. Les musulmans en général, lui donnent une identité arabe, tandis que les maronites préfèrent la phénicienne ou même européenne. Les autres chrétiens (orthodoxes, catholiques…) sont divisés Enfin, les minorités ethniques, comme les Arméniens et les Kurdes ne s’engagent pas sur une identité globale du Liban et tentent de rester neutres.

Comment construire un pays si son identité n’est pas commune a toute la population ? Loin des appartenances religieuses, disent les communistes libanais, l’identité du Liban peut se construire sur son histoire et ses richesse culturelles. Dans son programme, le PCL se prononce pour la laïcité et l’égalité des droits.

Dans la tourmente très médiatisée des manifestations des pros et des anti-syriens et pro et anti-américains, le PCL s’est souvent distingué en manifestant seul à Beyrouth. Le 13 mars 2005, à son appel, plus de 3000 personnes manifestaient à la fois contre la présence de l’armée syrienne, contre l’ingérence étrangère (notamment des USA et de la France), contre la résolution 1559 et contre l’oppression policière.

Dans son programme, le PCL se prononce pour la laïcité et l’égalité des droits. Son projet politique pour le Liban est le suivant : suppression du confessionnalisme politique et autre ; réforme socio-économique dans le but d’asseoir la justice sociale ; opposition à toutes formes de corruption dans l’administration, la justice et la sécurité entretenue par les quotas confessionnels ; vote d’une loi électorale démocratique sur la base de l’unification du Liban en une seule et unique circonscription, à la proportionnelle, droit de vote à 18 ans et renforcement du rôle des femmes en politique ; La possibilité de la création d’un Sénat pour représenter les différentes confessions religieuses et politiques du pays.

Puissant avant la guerre civile, le PCL a été décimé par les années de guerre. De nombreux chiites ont quitté le parti vers la fin des années 70, pour rejoindre les partis chiites Amal et Hezbollah. Les sunnites se sont répartis entre le courant national et celui de Hariri et les Maronites se sont réfugiés dans leurs groupes confessionnels. Malgré cela, le PCL, reste l’unique grand parti politique multi-confessionnel. Et si, depuis 1992, il n’a plus de député au parlement libanais, ni de ministre au gouvernement, son projet politique reste le mieux placé pour en .finir avec le système politique confessionnel et le communautarisme qui bloquent l’avancée du peuple.


[1en vertu des Accords Sykes-Picot (1916) par lesquels le France et la Grande Bretagne se sont partagé le Moyen-Orient, puis d’un mandat de la Société des Nations, l’ancienne province ottomane de « Syrie naturelle » (qui comprenait la Syrie actuelle, le Liban et le Sandjak d’Alexandrette ou Hatay concédé en 1939 à la Turquie) est tombée dans l’escarcelle de la France. L’État moderne, tel qu’il existe aujourd’hui avec ses frontières a été créé en 1924, par Clémenceau qui en aurait dessiné les frontières. L’indépendance est octroyée au Liban en 1943 mais elle n’est effective qu’en 1946.

[2En 1947, devant le Congrès américain, le président Harry Truman présente sa doctrine dite de « containment » (endiguement). Il propose de mettre en place des aides économiques et financières pour que les pays puissent conserver leur indépendance. Visant explicitement les communistes et l’URSS, la doctrine Truman affirme que les Etats-Unis doivent être les défenseurs du monde libre

[3Armée du Liban Sud : milice libanaise supplétive de l’armée israélienne qui s’est rendu tristement célèbre par les traitements imposés aux détenus à la prison de Khiam où fut détenue et torturée la jeune communiste Souha Béchara, auteur d’une tentative d’assassinat sur le chef de l’ALS. L’ALS a été démembrée en 2000 avec le retrait de l’armée israélienne du Liban Sud.



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