Vaclav Klaus : Le Tchèque qui ne peut pas encaisser l’euro.

vendredi 26 décembre 2008
popularité : 4%

Ultralibéral et europhobe, le successeur de Sarko à la présidence de l’Union compte bien refroidir une Europe à ses yeux trop socialiste.

APRES Sarko, il fallait un phénomène à la tête de l’Union européenne. Pour ne pas laisser s’assoupir le Vieux Continent réveillé par une présidence française tonitruante.

Sarko n’a-t-il pas fait mentir Kissinger, qui disait autrefois :
« L’Europe, quel numéro de téléphone ? ».

Non seulement il a donné son numéro de mobile à tout le monde et mis Bush aux abonnés absents, mais en six mois, avec ses petits poings et selon la légende tricotée par ses communicants, il a arrêté la guerre entre la Géorgie et la Russie,sauvé les banques, stoppé la crise financière mondiale et freiné le réchauffement de la planète en allant au charbon sur un plan énergie climat un peu fumeux.

Tout en supervisant la promotion du disque de son épouse Carla Bruni.

Quel grand homme !.

A première vue, son successeur, qu’y s’y collera à partir du 1er janvier pour les six prochains mois, a le handicap de l’âge.

Mais s’il porte moustache et cheveux blancs d’un homme de 67 ans, il a la verdeur de l’europhobe populiste et provocateur.

Confidence d’un ministre sarkozyste : « Quelqu’un qui le connaît bien en France, c’est Claude Allègre, ce qui n’est pas forcément rassurant ».

Voilà Vaclav Klaus, président de la République tchèque depuis 2003, habillé pour l’hiver.

Ce n’est pas pour le gêner, puisqu’il ne croit pas au réchauffement climatique.

Il l’a expliqué en son temps aux élus du Congrès américain, qui en sont sortis échaudés, surtout ceux qui étaient près des radiateurs....

« Les questions environnementales sont un produit de luxe, maintenant que nous devons supprimer ce luxe », a-t-il dit, début décembre, à propos de ce plan climat sous lequel Sarko avait poussé les feux.

Cela a jeté un froid !

Klaus est donc parti pour dégraisser le mammouth.

Son mammouth à lui, c’est l’Union européenne, qu’il abhorre.

D’abord, il est allergique à ses symboles.

Daniel Cohn-Bendit a procédé à un test, le 5 décembre. Reçu par Klaus avec une délégation de députés de Strasbourg, il a posé un petit drapeau européen sur le bureau présidentiel.

Le chef de l’Etat a vite perdu son calme.

Surtout quand Dany a lancé un pavé en l’interrogeant sur ses relations avec le milliardaire irlandais Declan Ganley, militant du non au traité de Lisbonne, que Klaus avait visité en novembre à Dublin, suscitant alors un incident diplomatique.

« Ici vous n’êtes pas sur les barricades de Paris. Personne ne m’a parlé sur ce ton et dans ce style au cours des six dernières années », a éructé le chef de l’Etat tchèque.

Et d’ajouter :
« La manière dont M. Cohn-Bendit me parle, c’est exactement comme parlaient les Soviétiques ».

Ce qui traduit en français, pouvait se résumer par : « » Arrête ton char, Dany !"

Pour un peu, Klaus faisait donner la garde pour expulser l’insolent en Allemagne.

Le président tchèque avait déjà prévenu en octobre qu’il ne ferait pas hisser le drapeau européen sur le Château de Prague.

Sarko s’en est mêlé, la semaine dernière : « Ce n’est à l’honneur de personne que d’agir ainsi ».

« Il n’appartient pas à un autre chef de l’Etat de critiquer notre président », a rétorqué aussi sec le chef de la diplomatie praguoise.

L’ambiance entre les deux hommes, c’est l’électricité, sans les soviets.

Le Tchèque n’a pas digéré que Sarko propose en octobre de continuer à présider l’UE au niveau de la zone euro pendant un an pour pallier l’inexpérience praguoise.

Klaus ne peut pas sentir l’Union mais n’entend pas se priver du plaisir de la diriger.

Le côté chiraquien de Sarko, toujours un brin condescendant envers les anciens pays de l’Est, l’a donc exaspéré.

Les propositions françaises pour refondre le système financier international ?

Du « vieux socialisme », a-t-il tranché : « C’est comme si on essaye de traiter une grippe.... Si on va chez le médecin, cela prendra une semaine, si on ne fait rien, cela prendra sept jours. »

Sarko, à ses yeux, n’est qu’un charlatan.

Economiste ultralibéral, Klaus ne se reconnaît qu’un maître, Margaret Thatcher.

Il excècre l’interventionnisme, et pas seulement soviétique.

« Pour lui, l’Europe est un projet socialiste », assure Petr Drulack, directeur de l’Institut d’études internationales de Prague.

D’ou son euroscepticisme militant et son opposition au traité de Lisbonne.
Alors que l’Irlande est d’accord pour organiser un nouveau référendum en 2009, la Tchéquie demeure le dernier des 27 à ne pas s’être prononcé.

Klaus a réussi à retarder la ratification.

Paraphera-t-il le traité si le Parlement l’adopte en février ?

« Vous pouvez demander à un joueur d’échecs à quoi va ressembler la partie mais vous ne pouvez pas lui demander quel sera le cinquième coup », a-t-il répondu, en prenant la tangente sur la diagonale du flou.

Le populiste fait le spectacle.

Il est populaire en son royaume même s’in n’est pas prophète en son pays, ni même en son parti libéral, qu’il vient de quitter.

Mirek Topolanek dirige désormais le parti et le gouvernement.

Un premier ministre bien utile pour rassurer le reste de l’Europe

Sarko l’avait invité à déjeuner à l’Elysée, le 31 octobre, pour le convaincre de s’allier avec lui contre l’exubérant Professeur Klaus.

En dépit de cette précaution, la présidence praguoise sera-t-elle le cauchemar que certains redoutent ?

Ce qui est sûr, c’est qu’un Klaus qui ferait regretter la présidence française serait pour Sarko un vrai Tchèque cadeau.

Par Jean-Michel Thénard dans Le Canard enchaîné du 24/12/2008

Transmis par Linsay



Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur