Dossier Ardennes Forge / L’ancienne préfète entendue par le juge

samedi 6 mars 2010
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L’ancienne préfète des Ardennes a été entendue. Le magistrat cherche à savoir si les services de l’Etat ont encouragé, fermé les yeux ou ignoré ce qui est apparu comme un dévoiement du CTP [1]

La préfète Catherine Delmas-Comolli et l’ex-député Philippe Mathot ont été entendus par le juge chargé du volet « pénal » du dossier Ardennes Forge. [2]

Que du beau monde. Le magistrat instructeur en charge du volet pénal de l’affaire Ardennes Forge voit défiler dans son cabinet (via, le cas échéant, un système de visioconférence) une partie de « l’aristocratie » politico-administrative ardennaise de ces dernières années.

Un beau générique…

Voyez plutôt : l’ancienne préfète Catherine Delmas-Comolli (aujourd’hui en poste à Bourges, dans le Cher), son secrétaire général ayant rang de sous-préfet Jean-Luc Blondel (désormais secrétaire général à Amiens, dans la Somme), mais aussi l’ancien député UDF Philippe Mathot (toujours président de l’Agence pour la création d’entreprise), l’ex-directeur départemental du travail Jean-Marie Gonot ou encore la vice-présidente du Conseil régional Michèle Leflon, en charge de la formation (PCF).
Tous ont été entendus comme simples témoins dans le cadre de l’instruction ouverte pour « détournements de fonds destinés à la formation professionnelle ». Ce qui évidemment ne préjuge en rien de la suite.

De source proche du dossier, on explique que le juge veut comprendre quel mécanisme a prévalu lorsque quelques semaines après la liquidation de Thomé-Génot, à Nouzonville, il a été constitué une nouvelle société début 2007, Ardennes Forge, sur le même site, pour tenter de relancer l’activité (sur le même créneau, c’est-à-dire les pôles d’alternateurs).
A l’époque, le département avait accepté de racheter le parc machines et de signer un contrat de location-vente sur cinq années avec la nouvelle société. Et côté effectifs, plusieurs dizaines d’anciens salariés de Thomé-Génot avaient été « embauchés ». Ce n’était qu’une petite partie des 300 licenciés, mais c’était déjà ça…

Le problème, c’est de savoir dans quelles conditions ils l’ont été. Pour les salariés concernés et leur avocat qui a déposé plainte à la liquidation d’Ardennes Forge en juin 2008, il y a eu utilisation abusive du Contrat de transition professionnelle, le fameux CTP !

Qui a fait quoi ?

En effet, pendant plusieurs mois, les « métallos » ont été considérés comme stagiaires de la formation professionnelle (et donc rémunérés sur des fonds publics) alors qu’ils travaillaient et produisaient sur des machines qu’ils connaissaient par cœur !

Tout bénéfice pour le nouvel employeur, qui a même perçu des indemnités en tant que… formateur ! Montant du préjudice selon les ex-salariés : plus de 230.000 euros.

Deux mises en examen ont déjà été prononcées : elles concernent le PDG Bruno Quéval (pour « détournement ») et un technicien en charge du CTP (pour « complicité »).

« D’une certaine façon, je me réjouis que la justice fasse son travail et que la vérité puisse ainsi être mise au jour. Dans cette affaire, je n’ai fait que suivre les conseils des services de l’Etat, car j’ignorais même que ces dispositifs existaient dans le cadre du CTP et qu’Ardennes Forge pouvait éventuellement en bénéficier » nous avait déclaré au lendemain de sa mise en examen, en novembre 2008, Bruno Quéval…
Une façon d’insinuer qu’il n’entendait pas porter seul cet encombrant chapeau.

Dès lors, on imagine que c’est précisément ce que cherche à établir le magistrat : qui a conseillé le PDG et lui a ainsi permis de faire des économies substantielles (des milliers de pièces ont pu être produites et vendues avec une masse salariale… gratuite !), et qui a éventuellement fermé les yeux ? Fut-ce un effet d’aubaine apparu après la décision de relancer l’activité industrielle ou une vraie stratégie prévue d’entrée, quand quelques élus et décideurs ont contacté le groupe Farinia pour monter le projet ?

La suite de ce feuilleton le dira, sachant par ailleurs que se sont portées partie civile dans ce dossier la région (la vice-présidente Michèle Leflon avait dénoncé le dévoiement du CTP dès 2007) et plus récemment le syndic François Brucelle.

Par Philippe MELLET dans l’Ardennais du 03/03/2010

Transmis par Linsay


[1contrat de transition professionnelle NDR

[2Voir articles dans cette même rubrique et en particulier Ardennes Forge : le scandale s’aggrave.



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