Les faits

Djamila raconte :« Le 1^er soir de la fête, le vendredi 16 juillet, tout semblait bien se passer. Les gendarmes étaient passés l’après-midi chez moi, la mairie avait fait mettre des canisses devant ma terrasse et avec mes ami-e-s je passais une soirée tranquille. Vers deux heures du matin, alors qu’il ne restait chez moi que les enfants et trois amies, Aïcha, Nadia et Magali, un véritable commando passablement éméché a fait irruption, a barricadé la porte d’entrée et s’est rué sur nous en nous donnant force coups de pieds et de poings. Heureusement, un des enfants ayant pu sortir par la fenêtre [2] il a pu prévenir un des employés chargés de la sécurité de la fête et celui-ci, passant par le même chemin, a réussi à faire rentrer ses collègues et empêcher le pire…La gendarmerie et les pompiers prévenus nous nous sommes toutes quatre retrouvées à l’hôpital. » Fin du 1^er acte.

L’ex-mari de Djamila apprenant par un des enfants ce qui vient de se passer arrive quelques heures plus tard et l’explication avec les agresseurs présumés tourne au vinaigre et nouveaux échanges de coups, nouvelle intervention des gendarmes. Il est 5h du matin et les 4 femmes sont toujours en soin à l’hôpital où elles sont entendues dans le cadre de l’enquête qui démarre.

Dans la journée de samedi on apprend que la fête est annulée d’autant qu’à quelques mètres de là, et sans rapport avec les faits qui précèdent a eu lieu la même nuit une agression à l’arme blanche…

Si on peut comprendre cette décision de sagesse on ne peut que regretter que St Gély soit privé de sa fête et ce pour plusieurs raisons :

 Dans le Gard ces fêtes font partie d’une tradition populaire et marquent la vie du village.
 Une annulation consacre le fait qu’il n’apparaît pas possible de faire une fête sans risques et sans troubles
 Dans un contexte de crise économique aggravée les fêtes votives représentent un bol d’oxygène pour nombre de commerçants et artisans du coin, en particulier les paysans et viticulteurs qui peuvent à cette occasion écouler une partie de leur production.

Pouvait-on éviter cela ?

Oui, nous en avons vraiment le sentiment pour une histoire dont la portée dépasse vraiment ce village.

Djamila est née dans le Gard, à quelques kilomètres de St Gély et habitait, avant de s’y installer, un hameau voisin…mais elle n’est pas du village ce qui dans nombre de villages est déjà un handicap et, circonstance aggravante, elle s’appelle Djamila.

En 2003 quand elle s’installe à St Gély, elle commence par travailler pour M. Couderc, par ailleurs président du comité des fêtes. En mars 2004 il lui tient des propos que Djamila n’accepte pas (« tu fais du travail d’arabe ») et elle claque la porte. Elle se renseigne bien auprès de la CGT mais sa faible ancienneté et l’absence de témoin ne lui laisse que peu d’espoir de faire respecter ses droits elle démissionne en juin tout en disant clairement sa façon de penser à son patron.

Quand un mois plus tard la fête votive arrive, le président du comité des fêtes voit là une occasion de se venger et vient juste sous ses fenêtres la nuit avec son équipe bruyante. Et depuis, chaque année depuis 6 ans, la préparation de la fête votive est une occasion de faire sentir à Djamila qu’elle est indésirable. Ses plaintes ne donnant rien, elle tente de rencontrer la maire. Celui-ci daignera enfin la recevoir une fois pour lui dire en substance : « Si ça ne vous plait pas vous n’avez qu’à déménager »…

La réaction du maire est d’ailleurs curieuse…pour ne pas dire plus. Interrogé une première fois en juin par Rouge Midi il refuse de répondre. Puis au lendemain de la fête il s’exprime dans Le Midi Libre pour déplorer les incidents et quand Rouge Midi veut à nouveau l’interroger il refuse encore en parlant d’affaire privée… La fête annulée pour une affaire privée…dont il est allé s’entretenir à la préfecture de Nîmes comme nous l’a indiqué son secrétariat ?

La réaction du comité des fêtes n’est pas moins curieuse qui revendique, plusieurs jours après les faits, d’avoir annulé lui-même la fête (ah bon ! on croyait que c’était une décision des autorités) pour des évènements qui se sont passés en dehors de celle-ci et bien après l’heure de clôture… [3]

Depuis 2004 ni le comité des fêtes, ni le maire n’ont donc rien vu venir…C’est ce qui s’appelle faire la politique de l’autruche. Il y avait dès le départ un problème de rejet et de racisme il ne fallait pas le nier ni essayer de chasser l’intruse…Aujourd’hui le mal est fait et l’incurie de quelques-uns sera dure à réparer.

 Y-aura-t-il une fête votive à St Gély en 2011 ?
 Djamila qui travaille à St Gély pourra-t-elle y rester ?
 L’intégrité physique de Djamila et celle de ses enfants sera-t-elle assurée ?

Ni le maire, ni le comité des fêtes n’ont pour l’instant fait ce qu’il faut pour que l’on puisse répondre par l’affirmative à ces trois questions.

Charles Hoareau et Mohamed Bensaada