Un million ? Mais ce n’est rien du tout !

mardi 13 mars 2012
par  Charles Hoareau
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Grande tempête médiatique après la proposition d’un candidat de taxer à 75% les revenus supérieurs à 1 million d’euros par an. Et voilà que son concurrent propose lui, un impôt lié à la nationalité. Mauvais temps pour les riches ou tempête dans un verre d’eau ?

Il a suffi qu’un candidat se prononce pour une taxation augmentée des revenus au dessus d’un million d’euros annuels, pour qu’il y en ait, économistes officiels ou bien pensants reconnus, qui soient saisis d’un sentiment mêlé de colère et d’effroi. « Mais vous vous rendez compte ? Les riches vont partir ! » Autrement dit que va-t-on devenir sans eux ?

En effet la question mérite sûrement d’être posée : que peut devenir un pays sans ses riches et « leurs » limousines, « leurs » propriétés, « leurs » usines. On n’est pas ici à Caracas où, sans doute par "mépris pour les riches" et aucune "reconnaissance de leur réussite", un maire a pu confisquer des terrains de golf pour y construire à leur place des logements sociaux…

Toute la vie française serait menacée jusque dans sa dimension sportive puisque même les footballeurs concernés par cette mesure n’hésiteraient pas à quitter le territoire…et on les comprend. Enfin pas nous, eux. Eux qui se font du souci devant une telle mesure. Et ils expliquent en quoi celle-ci est profondément injuste (sic !).

L’autre matin sur France Inter, des journalistes affublés du titre d’éditorialistes se lamentaient. « Taxer des footballeurs c’est aussi inefficace qu’injuste. On sait tous (Ah bon ?) que si les footballeurs sont bien payés c’est parce qu’ils ont une carrière courte et que les taxer fortement les empêchera de mettre de l’argent de côté pour l’après compétition. »

Effectivement on n’y avait pas pensé. En dessous d’un million d’euros par an, soit 83 ans de salaire d’un smicard, "on le sait tous", on ne peut pas faire d’économies.

Ce qui est quand même curieux c’est que le même candidat propose dans la foulée d’augmenter le plafond du livret A et cela ne déclenche aucune tempête médiatique.

Pourtant suivant leur logique cela aurait dû !
A quoi ça sert d’augmenter le plafond de ce livret si toutes celles et tous ceux qui gagnent moins d’un million par an – soit 99% de la population [1] – ne peuvent pas y placer la moindre économie ! Mais passons…

Passons aussi sur le fait que pas un de ces médias bien pensants ne remette en cause le fait que le sport jadis amateur, soit devenu une industrie du spectacle où des hommes (surtout) et des femmes se vendent au plus offrant pour des salaires qui dépassent l’entendement et où la notion de loisir gratuit a complètement disparu.

Passons enfin sur le gadget de l’impôt lié à la nationalité : l’histoire nous montre que les riches n’ont jamais eu de patrie...

Cette question du million acceptable ou dépassable a donc mobilisé les médias pendant quelques jours pour un de ces débats dans lesquels ils tentent de nous entraîner.

Pourtant le débat pourrait être tout autre et poser la question suivante : à partir de quel montant un revenu devient « pas acceptable » pour reprendre l’expression de l’auteur de la proposition qui a occupé la scène ?

On pourrait par exemple s’interroger sur le fait que la CGT revendique selon les branches une échelle des salaires de 1 à 5 ou de 1 à 7, soit grosso modo, avec un SMIC revalorisé, un plafond de revenus de 10 000€ par mois, ce qui fait (à peine ?) 120 000€ par an. On est là très loin du million : c’est trop peu ? Un tel plafond serait il une catastrophe nationale ? Ce serait contraindre des milliers de gens à la misère ?

Il fut un temps pas si éloigné ou un autre candidat à la présidentielle [2] avait déclaré : « Au dessus de 40 000F par mois on prend tout ! » Ce qui avait bien plu dans les chaumières et fait frissonner dans les châteaux. Si on se rappelle qu’à l’époque le SMIC était aux alentours de 5000F cela reviendrait à peu près à reprendre aujourd’hui la même formule pour celles et ceux qui gagnent plus de 10 000€ par mois soit environ 10% de la population [3].

Cela poserait bien sûr bien autrement la question de la répartition des richesses dans nôtre pays et obligerait à répondre à celles et ceux qui diraient affolés « Mais ce n’est pas possible ils vont tous partir ! » qu’après tout les privilégiés de notre temps peuvent partir s’ils le veulent comme l’ont fait avant eux leurs ancêtres aristocrates déchus de 1789. Il existe des moyens de garder la richesse là où elle a été créée.

Cela suppose la maitrise des banques, des entreprises et de la monnaie par le peuple qui crée les fortunes, qu’aujourd’hui ce petit monde s’accapare.

Je vous entends déjà dire « oui mais ça c’est carrément révolutionnaire ! ». Oui sans doute.
Et pas hypocrite à la différence de ce débat surréaliste sur les "pauvres" multi-millionnaires par lequel on tente de nous faire croire que François Hollande est de gauche.


En médaillon, l’image publiée par le site Contrepoints, illustre un article d’Aurélien Veron ancien président de Liberté chérie et actuel président du parti libéral démocrate qui bien sûr s’insurge contre la mesure. Sans commentaire si ce n’est ceux déjà faits dans l’article.


[11% de personnes très riches gagne plus d’un million par an quand on additionne toutes les sources de revenus personnels. Ce chiffre ne prend pas en compte les éventuels cumuls familiaux. Source étude de Landais-Piketty-Saez,

[2Georges Marchais en 1981

[3même source



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