En Syrie, les réfugiés palestiniens du camp de Yarmouk isolés par les combats.

mercredi 8 avril 2015
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Soumise depuis près de deux ans au siège impitoyable imposé par le régime syrien, cette enclave, située à huit kilomètres au sud de Damas, voit ses souffrances décuplées depuis qu’elle est le théâtre de violents combats. L’assaut lancé le 1er avril par les djihadistes de l’État islamique (EI) leur a permis de s’emparer de la majorité de Yarmouk. _ Des combattants palestiniens affiliés, entre autres, au groupe Aknaf Beit Al-Maqdess, proche du mouvement islamiste palestinien Hamas, tentent de résister.
De la nourriture, de l’eau, des médicaments, des couvertures : les humanitaires parent au plus urgent pour soutenir les civils qui ont réussi à fuir, de nuit, le camp palestinien, pour lequel le Conseil de sécurité de l’ONU a réclamé, lundi 6 avril, un accès aux agences d’aide.

Urgence pour les réfugiés palestiniens de Yarmouk !

Après avoir compté près de 200 000 habitants à la veille de la guerre « civile » syrienne, le camp de Yarmouk n’abritait plus fin mars qu’à peine 18000 habitants après des mois d’étranglement par le régime et de luttes internes entre les mouvements présents à l’intérieur du camp et à l’extérieur.

Personne n’aura oublié ces images insoutenables des réfugiés attendant la distribution de secours alimentaires de l’UNRWA.

Il aura fallu la prise de contrôle d’une partie du camp par Daech ces derniers jours et les bombardements indiscriminés du régime pour remettre sous les feux de l’actualité ce cas dramatique et emblématique de la situation des réfugiés palestiniens, d’ordinaire invisibles pour la plupart des médias et largement ignorés par la communauté internationale.

Les réfugiés palestiniens se sont vu reconnaître leur droit au retour et à compensation pour les dommages subis lors de la Nakba, par la résolution 194 de l’ONU en décembre 1948, résolution qu’Israël s’est toujours refusé à mettre en œuvre. Ils doivent bénéficier, comme tous les réfugiés, de la protection de l’ONU dans les lieux où ils ont été contraints de s’établir.

Dans l’immédiat l’ONU et ses états membres, et la France au premier chef, doivent exiger la mise en place de couloirs humanitaires sécurisés pour se rendre dans des zones à l’abri des combats et renforcer les capacités de l’UNRWA pour leur venir en aide.

Mais il ne s’agira que de solutions provisoires. Beaucoup d’entre eux ont déjà été accueillis dans des conditions de grande précarité par d’autres réfugiés palestiniens au Liban et en Jordanie. Et la région croule aujourd’hui sous le nombre des réfugiés.

La France, elle, n’a reçu depuis 2011 que 5000 réfugiés de Syrie. Le commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Nils Muiznieks, a souligné en février qu’elle « devrait accroître ses efforts afin d’accueillir davantage de réfugiés syriens sur son territoire, compte tenu de l’ampleur sans précédent de la crise humanitaire des réfugiés syriens (3,8 millions de réfugiés dans les pays limitrophes et 7,8 millions de déplacés à l’intérieur du pays) ».

Elle ne peut se dérober à ces obligations humanitaires d’urgence.

Mais au-delà de la réponse humanitaire, cela montre une fois encore que la question des réfugiés palestiniens ne peut être éternellement éludée et cachée comme s’en accommode depuis des décennies la communauté internationale, en se reposant sur l’UNRWA pour le volet humanitaire et en acceptant de fait un statu quo politique injuste et illégal pour le plus grand bénéfice des autorités israéliennes.


Le Bureau national
Communiqué de l’AFPS, mercredi 8 avril 2015

« Plus aucun abri »


Pour les civils piégés dans le camp, aucune aide humanitaire ne parvient. Palestiniens, mais aussi Syriens, ils dépendaient pourtant entièrement des rares distributions et de ce qu’ils pouvaient arracher – des herbes, selon des témoignages – sur les terrains agricoles du camp, devenus inaccessibles.



« Les habitants n’ont aucun abri, ils peuvent au mieux se réfugier aux rez-de-chaussée pour tenter d’échapper aux obus et aux tirs. Ils sont terrés chez eux, rapporte Wesam Sabaaneh.

Il n’y a pas d’eau potable à Yarmouk, aucun lieu pour se ravitailler. De nombreux civils ont faim, sont blessés, et personne ne peut les secourir. » Une fillette de 12 ans a été tuée mardi 7 avril dans le camp. Les combats ont fait au moins 38 morts depuis le 1er avril.

La situation humaine est d’autant plus dramatique que l’aide internationale parvenait déjà au compte-gouttes au cours des derniers mois. Son acheminement a toujours dépendu du bon vouloir des autorités syriennes, qui ont étranglé le camp depuis juin 2013, affirmant vouloir venir à bout des rebelles anti-Assad.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) n’a plus pu pénétrer à Yarmouk depuis octobre 2014.

Soumise aux mêmes contraintes, l’UNRWA n’a pu délivrer, en 2014, que moins du quart de la nourriture nécessaire, et ce n’est qu’en mars que l’agence a pu faire sa première distribution pour l’année 2015. Selon Wesam Sabaaneh, « près de 170 personnes sont mortes de faim » depuis deux ans.

A cette damnation s’ajoute aujourd’hui la terreur suscitée par l’État islamique. Des habitants de Yarmouk ayant pris la fuite ont affirmé à l’AFP avoir vu des « têtes décapitées » dans les ruelles du camp.

Par Laure Stephan (Beyrouth, correspondance)

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/04/08/en-syrie-les-refugies-du-camp-de-yarmouk-isoles-par-les-combats_4611748_3218.html#J2GkDOrt4xQRdVV7.99



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