Choléra à Haïti et ailleurs : un symptôme de l’impérialisme

mardi 7 décembre 2010
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L’épidémie de choléra a déjà entraîné la mort de plus de 2.000 personnes et l’hospitalisation de plus de 90.000 autres en Haïti où elle sévit depuis la mi-octobre, a annoncé lundi le ministère de la santé publique dans un communiqué, 2000 morts qui se rajoutent aux 300 000 dus au séisme...et à l’impérialisme.
Cet article a été écrit le 16 novembre à un moment où l’épidémie n’avait fait « que » 337 morts.

Transmissible par l’eau, cette maladie intestinale se traduit par des diarrhées et des vomissements violents, et entraîne la mort par déshydratation en quelques heures si aucun traitement n’est apporté. Sachant que dans 75% des cas, la bactérie ne provoque pas de symptômes, le nombre des personnes porteuses doit avoisiner 15 000.

Selon des représentants des Nations Unies et le ministère haïtien de la Santé, l’épidémie risque fort de prendre de l’ampleur et pourrait faire des dizaines de milliers de victimes. Si elle se propage dans les bidonvilles de la capitale, Port-au-Prince, il se peut qu’elle échappe à tout contrôle. Sont particulièrement vulnérables les 1300 villes-campements insalubres où vivent encore environ 1,3 million de personnes, dix mois après le tremblement de terre dévastateur, dont le lourd bilan s’est élevé à 250 000 morts.

Six cas de choléra au moins ont déjà été signalés à Port-au-Prince, mais on suspecte fortement les autorités haïtiennes de ne pas vouloir reconnaître que l’épidémie a atteint la capitale. Des responsables de la santé prétendent qu’il s’agit de personnes ayant contracté la maladie dans le département rural de l’Artibonite, alors que les médecins d’une clinique disent avoir pris en charge une jeune fille de Cité Soleil – le plus grand bidonville de la capitale – qui n’était pas sortie de la ville.
On n’avait plus vu pareille épidémie de choléra ni à Haïti ni dans l’hémisphère ouest depuis plus d’un siècle. La maladie est facile à prévenir et à traiter, à condition de disposer des conditions sanitaires élémentaires et d’eau salubre. Or, la grande majorité des Haïtiens n’ont pas les moyens d’accéder à ces conditions ; la moitié de la population vit dans une extrême pauvreté. Un rapport du Fonds international de développement agricole révèle que dans les zones rurales, où résident la plupart de Haïtiens, moins de 8% de la population a accès à l’eau potable.

Dans le pays, comme dans les camps de Port-au-Prince où plus d’un million de personnes croupissent sous des tentes de fortune, pratiquement personne ne dispose d’eau courante.

Il est faux de considérer l’épidémie de choléra comme une conséquence du tremblement de terre de magnitude 7 qui a frappé Haïti en janvier dernier. Les conditions sociales apocalyptiques propices au développement de la maladie étaient réunies bien avant le séisme. D’ailleurs, si celui-ci a fait autant de ravages, c’est que les Haïtiens se trouvaient déjà dans une situation de grande vulnérabilité.

À l’origine de ces conditions, des relations économiques et politiques forgées par un siècle d’oppression et d’exploitation de ce pays, alors aux mains de banques et de grands groupes américains. La domination a été instaurée sur fond de répression brutale de la population par les troupes d’occupation américaine et à travers une série de dictatures soutenue par les gouvernements US, notamment celle de la tristement célèbre dynastie Duvalier, qui pendant près de 30 ans s’est maintenue grâce àla terreur semée par les Tontons Macoutes.

La réaction de l’administration Obama au lendemain du tremblement de terre de janvier s’inscrit tout entière dans la droite ligne de cet héritage honteux : envoyer 12 000 soldats armés prendre le contrôle des zones stratégiques de la capitale dans le but d’assurer qu’aucun soulèvement populaire ne vienne mettre en question la domination US et le règne de l’opulente oligarchie. Les troupes ont été rappelées aussitôt la sécurité garantie, laissant derrière elles une Haïti en ruines.

Rien n’a été fait pour remplacer les infrastructures dévastées – qui se trouvaient déjà , avant la catastrophe, dans un état de grand délabrement. À Port-au-Prince, à peine 2% des gravats ont été évacués, une étape pourtant indispensable avant d’entamer toute reconstruction.

Par ailleurs, alors que des millions de gens ordinaires, aux Etats-Unis et ailleurs, ont répondu massivement aux appels d’aide en faveur d’Haïti, les dons ne sont pratiquement pas parvenus au peuple haïtien.

Moins de 2% des 5,3 milliards de dollars promis par les gouvernements de différents pays du monde pour 2010-2011 ont effectivement été versés. La palme de la parole en l’air revient aux Etats-Unis, qui n’ont pas versé un penny des 1,15 milliards annoncés. Aujourd’hui, si la population haïtienne se trouve à la merci de l’épidémie de choléra, c’est à cause de cette attitude criminelle, de ces engagements non tenus.

Une partie de l’aide en provenance des Etats-Unis a renforcé la crise. Washington a subventionné l’exportation de riz bon marché vers Haïti, au détriment des agriculteurs locaux qui ont vu les prix s’effondrer, une mesure qui expose ainsi au risque de faillite tout le secteur agricole du pays, sur lequel 66% de la population compte pour survivre.

La politique d’aide suivie par Washington, dont le but est de renforcer la subordination de Haïti au capitalisme US et de renforcer les intérêts stratégiques américains dans la région, ne date pas d’hier.

Cette stratégie joue un rôle direct dans la propagation du choléra. Pour tenter de saper le gouvernement du président Jean-Bertrand Aristide — renversé ensuite en 2004 par un d’un coup d’État soutenu par Washington — les États-Unis ont gelé les prêts de la Banque Interaméricaine de Développement destinés au développement des infrastructures de distribution de l’eau, y compris l’acheminement d’eau salubre dans la département de l’Artibonite, épicentre de l’épidémie.

Le sort des Haïtiens n’est pas unique en son genre. Sur la planète, des milliards d’êtres humains se trouvent dans des situations semblables d’extrême pauvreté, exposés à des maladies d’un autre âge que la technologie moderne permettrait de prévenir totalement.

La semaine dernière, les Nations Unies ont rapporté qu’au Nigeria, 1500 personnes sont mortes du choléra et que trois autres pays africains connaissent une résurgence de la maladie. Le Pakistan et le Népal ont également annoncé être touchés. Selon l’Organisation mondiale de la santé, il y aurait à l’échelle mondiale 3 à 5 millions de cas par année et près de 120 000 victimes. Et le bilan va s’alourdissant, reflétant les conditions de vie de plus en plus effroyables qui découlent d’un capitalisme en crise.

Si l’on considère l’ensemble des maladies transmissibles par l’eau, les chiffres sont encore plus saisissants. Toujours selon l’OMS, cette année, ces maladies emporteront 1,4 millions d’enfants, dont 90% avant l’âge de 5 ans. Cela veut dire que chaque jour, 4000 enfants mourront pour ne pas avoir disposé de conditions d’hygiène élémentaires et d’un accès à une eau salubre.

A Haïti comme ailleurs, ces conditions constituent un chef d’accusation irréfutable contre le système de profit, qui subordonne tous les efforts humains à l’enrichissement d’un petite élite financière et passe par profits et pertes la mort de millions d’êtres humains.

Sans une transformation des fondements de l’ordre social existant, les gens vont continuer à succomber par millions à des maladies pourtant faciles à prévenir et à guérir ; l’éradication de la pauvreté n’est pas possible dans le cadre d’un système orienté vers le seul profit.

Le défi, à Haïti comme ailleurs, est d’en finir avec le système capitaliste et de réorienter la vie économique mondiale de sorte à ce qu’elle réponde aux besoins de la population mondiale et non qu’elle serve uniquement à produire des bénéfices.

Traduit de l’anglais par Chloé Meier pour Investig’Action

Par Bill Van Auken le 16/11/2010

Source originale : wsws

Concernant l’Afrique on pourrait compléter par les forts soupçons qui pèsent sur des statistiques faussées par le fait que nombre de morts dus au choléra et observés par les populations, seraient ensuite attribués au sida dans plusieurs pays par des gouvernements cachant ainsi leurs responsabilités sur un développement du choléra dû aux conditions sanitaires en général et de distribution de l’eau en particulier.

Transmis par Linsay



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mardi 7 décembre 2010 à 17h43 - par  ROBERT GIL

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